Monday, April 2, 2007

Tokyo en campagne

Cessons un instant de nous focaliser sur cette campagne présidentielle franco-française car ici aussi les coeurs palpitent pour un évènement politique d’importance : le 8 Avril, les Tokyoites auront en effet l’immense joie et privilège d’élire leur bien-aimé gouverneur. Oui, évènement d’importance car, outre que Tokyo est la plus grande ville du monde, elle est également capitale et vitrine du Japon, participant donc au rayonnement international du pays. Notons enfin que cette élection est considérée comme un test préliminaire avant les élections de la Chambre Haute de cet été.
Tout d’abord je voulais vous donner quelques informations soporifiques sur le mode de scrutin, mais celui-ci s’avère relativement obscur, même pour les Japonais (je vous avouerais que mes investigations n’ont pas été poussées plus loin que le seuil de ma porte, mais bon ça vous donne déjà une idée...). Pour résumer j’ai découvert après des heures de recherche intense sur wikipedia que les élections ont approximativement un tour. Après quelque effort de déduction, je peux raisonnablement affirmer que celui qui obtient le plus de suffrages au premier tour est élu.
Les moyens mis a la disposition des candidats Tokyoites sont de mon point de vue assez limites si on les compare au matraquage médiatique auquel le français moyen est soumis en cette période électorale. Le principal moyen de communication des candidats semble être le mégaphone : déambulant dans les rues fréquentées de la capitale nippone ou stationnant en double file près des stations de métro, le candidat moyen aime a percer les tympans de ses électeurs potentiels a l’aide de l’instrument diabolique. L’habitant de Tokyo doit sûrement y trouver un indicible plaisir auquel le français que je suis est hermétique, encore une preuve du raffinement nippon. En revanche, on a beau être au pays du tout technologique, l'utilisation de l’internet comme moyen de prosélytisme est totalement proscrit : les candidats se doivent donc de stopper la mise a jour de leur blog politique pendant la période de campagne officiel. Enfin, contrairement aux années précédentes, les candidats ont cette fois le droit de distribuer des tracts pendant la campagne a raison d’une seule page 21/29.7. Gageons que ceux-ci ne se priveront pas de cet importante contribution a leur effort de guerre.

Une pléthore de candidats est dans la course, 14 au total :

Shintaro Ishihara, ancien écrivain et candidat sortant. Populiste de droite (voire très très de droite), il a notamment contraint les enseignants de la capitale a chanter le 君が代 (Kimigayo, l’hymne national) en salle de classe. Historiquement, le 君が代, hymne officiel durant la seconde guerre mondial, était lié a des valeurs nationalistes et militaristes. Après la défaite, il a donc était abandonné et ce n’est qu’en 1999 que Koizumi a légalement remis au gout du jour ce symbole de l'empire japonais.
En outre il a le sens des formules percutantes : « Le français ne peut être une langue internationale car c’est un langage dans lequel personne ne peut compter », (Référence aux nombres de onze a seize et a notre célèbre quatre-vingt). Vous remarquerez avec quel brio il conforte la dimension internationale de Tokyo.

Shiro Asano, ancien préfet de Miyagi et Maire de Sendai (jumelée avec Rennes pour information et destination de mes prochaines vacances). Un des challengers les plus sérieux de Ishihara. Comme on dit par ici, il est très colère a propos du 君が代(l’hymne national pour ceux qui suivent...), il veut arrêter toute forme de discrimination des individus les plus faibles et trancher avec la manière dictatoriale de gouverner de Ishihara. En un mot, il va bouffer tout cru l’actuel gouverneur et faire de sa peau de nationaliste frustré un abat-jour du meilleur goût. Bref un être charmant.

Yoshiro Nakamatsu, un célèbre inventeur surnomme Dr NakaMats.
Des préoccupations claires : « Je protégerais Tokyo contre les attaques d’une invention qui ferait voler des missiles dans notre ciel ». Outre la tournure de la phrase directement imputable a une traduction laborieuse et pataude, vous apprécierez la subtile référence a son propre métier. Précisons qu’il veut mener campagne sous son nom de scène…

Kouichi Toyama, balançant entre anarchisme et fascisme, il est un candidat, comment dire... atypique.
Une thématique simple: « Ce pays est un désastre ! changement par ci, reforme par la… Moi, je n’ai absolument aucun intérêt a ce genre de chose. Détruisons le Japon ! Je n‘ai de toute façon aucune proposition constructive ». Je vous avouerai que pour le coup je suis un peu a cours de commentaire... Mais je vous rajoute une petite vidéo de son discours officiel d’entrée en campagne : désolé c’est en Japonais mais si vous allez directement a la 5e et dernière minute vous aurez un aperçu percutant du sens global.



Puis, en vrac, l’architecte Kisho Kurokowa (le préféré de beau-papa) l’ancien maire communiste Manzo Yoshida, la professionnelle de feng shu Kumiko Uchikawa, le comédien de télévision Kinzo Sakura, le devin Takashima…
Nos amis Tokyoites ont donc une petite troupe de candidat éclectique qu’on leur envierait presque : personnellement je leur enverrais bien De Villiers et Bové pour compléter le tableau.
Comme je vois que vous avez une envie folle de connaître l’issue de ce scrutin, je vous fais part du résultat des dimanche

PS : Si vous voulez un point de vue unique sur les élections de Chiba, lisez cet article de Thomas.
PPS : En avant première pour vos petits yeux ébahis, voici la vidéo officielle du Democratic Party (différent du Liberal Democratic Party qui gouverne sans partage depuis des décennies au Japon) pour les élections de la Chambre Haute cet été. Les trois personnages en action sont en fait les trois plus hauts responsables du parti. C’est encore en Japonais non sous-titré évidemment, mais si vous vous imaginez Hollande, Jospin et Strauss-Khan a leur place, l’effet est immédiat.




No comments: